Je voudrais improviser

« Je voudrais improviser » …..extraits de l’ouvrage

L’improvisation, qui est une faculté naturelle de l’homme, permet cette investigation : elle est le langage parlé de la musique. Le rôle de l’éducateur musical est d’entretenir et de développer cette aptitude à l’exploration puis de répondre au désir de laisser des traces. L’écriture apparaît alors comme une mémoire. Leur exégèse a déjà été faite. La presse quotidienne et la presse spécialisée (pour parents ou musicale) en ont retenu quelques aspects extérieurs, ce qui ne veut pas toujours dire « non pertinents », et Robert lui-même, dans ses articles, a présenté à plusieurs reprises d’autres aspects du noyau d’idées qui inspire ses tâches. Un exemple : ces déclarations de Mai 1996 au « Monde de la musique » : « C’est l’oreille qui dirige le muscle. Pas de technique sans idée musicale. L’instrumentiste est le chorégraphe de ses mains. Le son est à l’image du geste qui l’a produit. A une pensée musicale intentionnelle correspond un geste juste. C’est le va-et-vient entre l’oreille et le geste qui construit la technique. Les doigts répondent aux déséquilibres imposés par le geste, comme le funambule qui recherche en permanence son centre de gravité. Chaque individu a des prédispositions pour un type de technique. Chacun trouvera dans la musique son expression motrice. Le professeur doit chercher à étendre cette technique, pas à la modeler à son goût. C’est l’étudiant qui choisira son cheminement et non le professeur qui le lui imposera. Mettre en oeuvre une technique vivante, c’est interpréter comme si on créait… » Ces principes pourraient être développés sur le strict plan conceptuel. Mais un tel éclairage ne pourrait aider à comprendre la réalité mouvante de cet enseignement polymorphe. Et puis il est bien connu que des principes séduisants ne garantissent rien, et peuvent produire de tristes résultats. Pour une fois où leur vie effective nous offre une chance sérieuse d’observer le contraire, autant en profiter ! Et l’on commencera donc par là où tout commence (Programme de l’I.F.P.M.) : « Le travail avec les tout-petits permet de mieux comprendre les grands principes pédagogiques. Ces principes sont alors applicables à toutes tranches d’âge et à tous instruments. » Ce qui sonne déjà comme une révolution douce

…………………………………………………………………….. Exemple des processus dialogiques qu’elles génèrent quasi automatiquement : un enfant de 18 mois se fait tomber d’un tabouret sur le piano, puis regarde Robert, et pendant ce temps, se met à jouer une note sur le piano. Tout ce protocole est fait pour signifier : « Voilà ce que je fais, qu’est-ce que tu me renvoies ? ». Robert lui répond par une autre phrase musicale, et ainsi se développe tout un jeu d’interactions, etc. Dimension supérieure : ces interactions ne sont pas une fin en soi. Le cadre où elles se développent va infiniment plus loin que la captation de l’affect de l’enfant. Il trace un premier contour de la notion d’  » éducation par la musique « . Dans un premier temps, Robert K. fonctionne comme le miroir de ce que propose l’enfant, puis, il en fait quelque chose de plus : « Et qu’est-ce que tu penses de ça ? ». Ou encore, il propose une variante, un autre développement à partir de la même cellule, mais traitée autrement. Alors, l’enfant s’amuse sur les variantes. Mais l’adulte peut aussi y introduire des contretemps qui le bloquent ou le déstabilisent, il ne saisit plus ce qui lui est renvoyé, et, mis à l’envers, il va réagir : « Tu me fais ça ? Bon eh bien je vais te faire ça ». Il y a donc une forme d’exploration. L’enfant doit sentir que c’est pour le faire aller plus loin, qu’il y a une résistance bienfaisante. Mais le pédagogue utilise pour l’analyser une de ces métaphores sportives qui le caractérisent : dans l’apprentissage du vélo, l’on peut déstabiliser pour susciter un nouvel équilibre. Jean-Paul B. : « Il faudrait préciser : ces situations d’improvisation provoquée et interactive me semblent calculées pour faire intérioriser à l’enfant le langage musical de l’adulte en tant qu’il est une complexification du sien.

……………………………………………………….Je dicte des noms de notes en rappelant à l’enfant si cela monte ou descend, et au fur et à mesure de ses réussites, j’introduis des sauts de plus en plus grands et des mouvements de plus en plus complexes. On peut appeler cela une « lecture auditive ». Mais ceci repose sur un contact immédiat avec le mécanisme de l’enfant, alors que dans la musique écrite, cette inversion du rôle des doigts se traduit pas un système de notation rigoureusement identique. Ce qui a été fait avant relève de sensations kinésiques, par exemple le rapport grave / aigu. Pour l’aigu, il faut se hisser, il y a un effort, c’est un mouvement vers l’extérieur. Pour le grave, on laisse se poser, c’est un mouvement vers l’intérieur, en rapport avec l’attraction universelle. Alors que pour le sens de la lecture, c’est un conditionnement. « Ça s’éloigne de moi, donc ça monte » : voilà qui induit des différences de lecture selon que la partition est placée à la verticale ou à l’horizontale. D’où le problème des gauchers : ils ne font pas l’ouverture de l’aigu dans le « bon » sens, celui des pianos. Il peut y avoir des problèmes profonds de lecture de la musique, qui exigent une analyse de tout le circuit. Donc, il est important de repérer les problèmes posés par le fait que la « montée » vers les aigus et la « descente » vers les basses ne sont pas symétriques dans l’écriture musicale. Les notions de « haut » et « bas » font appel à l’oeil, qui appelle le son. L’oeil monte, le son monte, l’oeil descend, le son descend. D’où les exercices avec traits montant et descendants pour les petits. Mais l’écriture de gauche à droite est une convention, donc un conditionnement. Et son adaptation au piano pose divers problèmes : l’écriture va toujours dans le même sens, on monte et on descend toujours vers la droite. Pour les aigus, ça colle entièrement, mais pas lorsque l’on va vers les graves, où la main doit aller vers la gauche alors que l’écriture continue d’aller vers la droite. La descente toute seule (qui est le fait de l’oeil) n’aide pas à comprendre. C’est le problème du rapport entre ce qui est fermant et ce qui est ouvrant. Cela m’a amené à développer la notion de doigt sonorisé : c’est le résultat de l’influence de l’objet piano, de sa construction, sur le système des doigts. Le même travail 1 2 3 4 5 fait aller de do à sol avec la main droite, de do à fa en avec la main gauche. Les doigts des pianistes sont conditionnés par l’instrument pour un système de numérisation où le mouvement montant part avec le pouce à la main droite et le cinquième à la main gauche. Ceci concerne le comptage des noms de notes. » La perception de cette dimension à partir des problèmes éprouvés par ses élèves a amené Robert K. à mettre au point des exercices .

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